La Cour de Justice élargit la définition « d’information précise » pour qualifier un délit d’initié

Le délit d’initié est sanctionné par le droit de l’Union Européenne, comme il l’est par le droit français à l’article L465-1 du Code pénal.
C’est la Directive 2003/6/CE 1 qui interdit les opérations d’initiés et oblige les émetteurs d’instruments financiers à rendre public toute information privilégiée qui les concernent directement, c’est-à-dire toute information à caractère précis susceptible d’influencer de façon sensible le cours des instruments financiers concernés.
La Directive 2003/124/CE 2 complète la Directive 2003/6/CE en ce qu’elle ajoute qu’une information est considérée comme précise lorsqu’elle permet d’évaluer si les circonstances ou l’évènement qui en sont l’objet sont susceptibles d’avoir un effet sur les cours des instruments financiers concernés.

Par un arrêt du 11 mars 2015 rendu dans le cadre de l’affaire Jean-Bernard Lafonta contre Autorité des marchés financiers 3, la Cour de Justice apporte une nouvelle interprétation de ce qu’est une information précise.
La Cour juge en effet que les libellés des deux Directives précitées ne sauraient limiter les informations à caractère précis uniquement à celles qui permettent de déterminer dans quel sens le cours des instruments financiers concernés est susceptible de varier 4.
Seules les informations vagues ou générales qui ne permettent de tirer aucune conclusion quant à leur effet possible sur le cours des instruments financiers concernés peuvent être considérés comme étant non précises.

Si une information ne pouvait être considérée comme précise qu’à la condition qu’elle permette de déterminer le sens de variation du cours des instruments financiers concernés, le détenteur de l’information pourrait prétexter l’existence d’une incertitude à cet égard pour s’abstenir de rendre publiques certaines informations et ainsi en tirer profit au détriment des autres intervenants sur le marché.

Ainsi, la Cour affirme qu’une information doit être divulguée au public même si son détenteur ne sait pas quelle influence précise elle aura sur le cours des instruments financiers.

  1. Directive 2003/6/CE du Parlement Européen et du Conseil, du 28 janvier 2003, sur les opérations d’initiés et les manipulations du marché (JO n°L 96, p.16)
  2. Directive 2003/124/CE de la Commission du 22 décembre 2003, portant modalités d’application de la directive 2003/6 en ce qui concerne la définition et la publication des informations privilégiées et la définition des manipulations de marché (JO n° L 339, p.7)
  3. CJUE, Aff. C-628/13, arrêt Jean-Bernard Lafonta contre Autorité des marchés financiers du 30 avril 2014, Renvoi préjudiciel
  4. Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), CP n°33/15, Arrêt dans l’affaire C-628/13 Jean Bernard Lafonta / Autorité des marchés financiers, Luxembourg, 11 mars 2015
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