Le 28 janvier 2016, la Cour de justice rendait un arrêt Rosanna Laezza c. Italie relatif au contrôle de proportionnalité que le juge doit effectuer en matière d’obligations imposées en matière de paris1.
La législation italienne prescrit que l’exercice des activités de collecte et de gestion des paris est subordonné à l’obtention d’une concession et d’une autorisation de police.
En 2012, l’Italie a lancé un appel d’offres en vue d’attribuer de nouvelles concessions. Le projet de convention de concession, joint à l’appel d’offres, prévoyait notamment que, lors de l’expiration, de la déchéance ou de la révocation de la concession, le concessionnaire était tenu de céder à titre gratuit l’usage des biens matériels et immatériels constituant le réseau de gestion et de collecte du jeu.
Lors d’un litige au sein de cet Etat, le Tribunale de Frosinone (Tribunal de Frosinone, Italie) s’interroge sur la compatibilité des nouvelles concessions avec le droit de l’Union, en particulier au regard de l’obligation imposée aux nouveaux concessionnaires de céder à titre gratuit, lors de l’expiration, de la déchéance ou de la révocation de la concession, les équipements utilisés pour la collecte de paris.
La Cour relève que l’obligation de cession n’apparaît pas discriminatoire, dans la mesure où elle s’applique indistinctement à l’ensemble des opérateurs ayant participé à l’appel d’offres lancé au cours de l’année 2012.
La Cour observe néanmoins qu’une telle obligation peut rendre moins attractif l’exercice de l’activité de collecte de paris. En effet, le risque pour une entreprise de devoir céder, sans contrepartie financière, l’usage de biens en sa possession est susceptible de l’empêcher de rentabiliser son investissement et constitue donc une restriction aux libertés d’établissement et de prestation des services, garanties par le droit de l’Union.
Toutefois, la Cour rappelle que l’objectif ayant trait à la lutte contre la criminalité liée aux jeux de hasard est de nature à justifier des restrictions aux libertés fondamentales, à condition que ces restrictions soient proportionnées, ce qu’il revient au juge national de vérifier.
Dans le cadre de l’objectif de lutte contre la criminalité liée aux jeux, la cession obligatoire des équipements utilisés pour la réception et la transmission des paris peut être justifiée par l’intérêt d’assurer la continuité de l’activité légale de collecte de paris afin d’endiguer le développement d’une activité illégale parallèle.
Lorsque la cessation de l’activité intervient du seul fait de l’expiration de la concession, le principe de proportionnalité n’est pas nécessairement respecté, dès lors que l’objectif de continuité de l’activité peut être atteint par des mesures moins contraignantes, comme, par exemple, la cession forcée des biens à titre onéreux au prix du marché.
Le juge national devra donc évaluer si le principe de proportionnalité est respecté en tenant compte, entre autres, de la valeur vénale des biens qui font l’objet de la cession forcée.
- Cour de Justice, Rosanna Laezza c. Italie, 28 janvier 2016, C-375/14 ↩