La Cour de justice rejette le pourvoi demandant une réduction d’amende pour la société Degussa

La Cour de justice a rendu un arrêt le 16 juin 20161 par lequel elle rejetait le pourvoi formé par les sociétés Evonik Degussa GmbH (ci-après « Degussa ») et AlzChem AG (ci-après « AlzChem ») contre un arrêt du Tribunal du 23 janvier 2014 2.

Par une décision du 22 juillet 2009, la Commission a infligé une amende à des sociétés dans le domaine de la production de réactifs à base de carbure de calcium et de magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier.
Les sociétés Degussa et AlzChem ont été condamnées solidairement avec la société SKW, cette dernière étant détenue à 100 % par les deux premières au moment des faits.

Le Tribunal a partiellement confirmé la décision prononcée par la Commission. Le Tribunal a en effet considéré que la Commission avait illégalement accordé une réduction d’amende à la société SKW au titre de la clémence.

Les sociétés Degussa et AlzChem ont formé un pourvoi contre l’arrêt du Tribunal.

La société Degussa contestait en particulier, d’une part l’imputabilité de l’amende à la société mère pour les agissements de sa société fille et d’autre part, le refus de libérer la société du paiement total de l’amende de 3,47 millions d’euros, se fondant sur le principe d’égalité de traitement.

La société Degussa soutenait que le Tribunal n’avait retenu, pour établir l’imputabilité de la sanction à la société mère Degussa pour les agissements de sa filiale SKW, qu’une influence potentielle ou théorique.
Or, la filiale SKW était détenu à 100 % par les sociétés Degussa et AlzChem. Par conséquent, avec un tel taux de détention, il existe une présomption d’exercice d’influence déterminante sur les décisions de la filiale par la société mère, comme l’a régulièrement jugé la Cour 3.
Cette présomption peut toutefois être renversée lorsque les requérants démontrent l’absence d’exercice effectif d’une influence déterminante par la société mère.
La société Degussa soutenait qu’elle avait adressé des consignes à sa filiale pour lui interdire de participer aux pratiques concernées, que cette dernière n’a pas respecté.

Dans cet arrêt, la Cour a retenu que le fait qu’une filiale « ne se conforme pas à une instruction donnée par sa société mère ne saurait suffire, à lui seul, à établir l’absence d’exercice effectif d’une influence déterminante par celle-ci sur celle-là, dès lors que la Cour a eu l’occasion de préciser qu’il n’est pas nécessaire que la filiale applique toutes les instructions de sa société mère pour démontrer l’existence d’une influence déterminante, sous réserve de ce que le non‑respect de ces instructions ne soit pas la règle » 4.
La Cour a jugé qu’en l’espèce, le Tribunal a simplement constaté que les requérantes ne démontraient pas l’absence d’exercice effectif d’une influence déterminante par celles-ci sur SKW et, partant, ne suffisaient pas pour renverser la présomption de détention du capital.

La société Degussa soutenait par ailleurs qu’elle devait être libérée du paiement total de la sanction, pour un montant de 3,47M€ et non seulement pour les 2,49M€ accordés par le Tribunal.
En effet, en l’absence de la réduction illégale de sanction accordée à la société SKW, accordée illégitimement par la Commission, les paiements effectués par SKW, ayant un effet extinctif sur l’amende solidairement prononcée, auraient atteint 3,47M€, libérant la société Degussa d’un paiement jusqu’à ce montant. Le montant réclamé à la société Degussa devait donc être réduit,au titre du principe d’égalité de traitement.

La Cour a rappelé qu« [‘il]est de jurisprudence constante de la Cour que le principe d’égalité de traitement, invoqué par les requérantes, doit se concilier avec le respect de la légalité, selon lequel nul ne peut invoquer, à son profit, une illégalité commise en faveur d’autrui »5.
La société Dégussa ne peut ainsi pas se prévaloir du principe d’égalité de traitement pour obtenir une réduction du montant de l’amende.
La Cour a constaté que la société SKW a déjà libéré les requérantes du paiement de la sanction solidairement infligée pour un montant de 2,49M€.
Selon la Cour, le montant restant dû par la société Degussa, de 1,24M€ « a été imposé exclusivement à Degussa en raison de la récidive et, partant, ne sera pas affecté par les paiements éventuellement effectués par SKW pour s’acquitter de l’amende mise à la charge de cette dernière ».

C’est ainsi que la Cour a rejeté les arguments de la société Degussa sur l’imputabilité de la sanction à la société mère pour les agissements de sa filiale et concernant le montant de la sanction réclamé à la société Degussa. La Cour a par conséquent rejeté le pourvoir formé par les sociétés Degussa et AlzChem.

  1. Cour de Justice de l’Union européenne, C‑155/14 P, Degussa c/ Commission, 16 juin 2016
  2. Tribunal de l’Union européenne, T‑391/09, Degussa c/ Commission, 23 janvier 2014
  3. Cour de Justice, C‑521/09, Elf Aquitaine/Commission, 29 septembre 2011 et Cour de Justice, C‑93/13 P et C‑123/13 P, Commission e.a./Versalis, 5 mars 2015
  4. Cour de Justice, C‑293/13 P et C‑294/13 P, Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce, 24 juin 2015
  5. Cour de justice, C 259/10 et C 260/10, The Rank Group, 10 novembre 2011
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