La Cour de justice a définitivement validé en janvier le rachat de Vivendi Universal Publishing par Lagardère

Par un arrêt du 28 janvier 2016, la Cour de justice a définitivement validé le rachat de Vivendi Universal Publishing par Lagardère1.
Elle confirme ainsi que la Commission était fondée à agréer une nouvelle fois Wendel comme repreneur de la part des actifs de Vivendi Universal Publishing que Lagardère était tenue de céder.

En septembre 2002, Vivendi Universal, une société opérant sur le marché de l’édition francophone, a décidé de céder l’ensemble des activités d’édition de livres qu’elle détenait en Europe par l’intermédiaire de sa filiale Vivendi Universal Publishing (VUP). Le groupe Lagardère s’est porté candidat pour acquérir ces actifs.

En 2004, la Commission a autorisé l’opération de concentration sous réserve de certains engagements pris par Lagardère.
La Commission a estimé que, en l’absence de ces engagements, l’opération de concentration conduirait sur plusieurs marchés à la création ou au renforcement de positions dominantes qui auraient comme conséquence une entrave significative à une concurrence effective. Ainsi, Lagardère s’est engagée à rétrocéder une partie importante des actifs de VUP. Elle s’est rapprochée de plusieurs entreprises susceptibles de racheter ces actifs. Parmi ces dernières figurait la société Éditions Odile Jacob qui a manifesté son intérêt pour l’opération.

À l’issue de la procédure de sélection du repreneur des actifs rétrocédés de VUP, Lagardère a retenu l’offre d’une autre entreprise, Wendel Investissement. La Commission a donné son agrément à ce repreneur. Odile Jacob a alors demandé au Tribunal de l’Union européenne d’annuler la décision d’autorisation de concentration et la décision d’agrément de Wendel. Par arrêts du 13 septembre 2010, le Tribunal a confirmé la décision d’autorisation de concentration, mais a annulé la décision d’agrément, au motif que cette dernière avait été adoptée sur le fondement d’un rapport rédigé par un mandataire ne répondant pas à l’exigence d’indépendance posée par la Commission2. Les arrêts du Tribunal ont été confirmés par la Cour de justice en 20123.

À la suite du prononcé des arrêts du Tribunal, Lagardère a présenté à la Commission une nouvelle demande d’agrément de Wendel en proposant un nouveau mandataire, lequel a été agréé par la Commission début 2011. Le 13 mai 2011, la Commission a agréé une nouvelle fois Wendel comme repreneur des actifs cédés, avec effet rétroactif au 30 juillet 2004. Odile Jacob a alors introduit un nouveau recours en annulation contre cette décision, lequel a été rejeté par le Tribunal dans un arrêt du 5 septembre 20143. Odile Jacob demande à la Cour d’annuler cet arrêt.

Dans cet arrêt, la Cour considère que le Tribunal a correctement jugé qu’afin de donner plein effet aux arrêts de 2010, la Commission devait agréer un nouveau mandataire chargé d’élaborer un nouveau rapport d’évaluation de la candidature de Wendel, puis autoriser ou refuser l’agrément de Wendel sur le fondement, notamment, de ce nouveau rapport.

En outre, la Cour écarte les arguments d’Odile Jacob dirigés contre la base légale de la nouvelle décision d’agrément de Wendel et contre l’effet rétroactif conféré à celle-ci par la Commission (et confirmé par le Tribunal). À cet égard, la Cour considère qu’Odile Jacob n’est pas parvenue à démontrer l’absence de critères justifiant un tel effet rétroactif. En particulier, cette nouvelle décision visait à atteindre plusieurs objectifs d’intérêt général, dont le respect par l’administration de la légalité et de l’autorité de la chose jugée.

Enfin, la Cour rejette les arguments d’Odile Jacob tendant à mettre en cause la confirmation, par le Tribunal, du caractère indépendant de Wendel vis-à-vis de Lagardère nonobstant la présence d’une même personne dans les organes de direction ou de surveillance de ces deux sociétés. En outre, la Cour souligne que les rapports que le mandataire devait régulièrement présenter à la Commission sur l’état de réalisation des engagements de Lagardère et, plus généralement, sur l’exécution de sa mission étaient manifestement de nature à permettre à la Commission d’assurer la surveillance de la procédure de cession des actifs.

  1. Cour de justice, C-514/14, Editions Odile Jacob SAS / Commission, 28 janvier 2016
  2. Tribunal, T-279/04 et T-452/04, Éditions Jacob/Commission, 13 septembre 2010
  3. Cour de justice, C-551/10 P, Éditions Odile Jacob/Commission, 6 novembre 2012 et Cour de justice, C-553/10 P et C-554/10 P, Commission/Éditions Odile Jacob et Lagardère/Éditions Odile Jacob
Publié dans Droit de la concurrence / Competition Law | Laisser un commentaire

L’arrêt Rosanna Laezza c. Italie soumet au contrôle de proportionnalité du juge des obligations imposées en matière de paris

Le 28 janvier 2016, la Cour de justice rendait un arrêt Rosanna Laezza c. Italie relatif au contrôle de proportionnalité que le juge doit effectuer en matière d’obligations imposées en matière de paris1.

La législation italienne prescrit que l’exercice des activités de collecte et de gestion des paris est subordonné à l’obtention d’une concession et d’une autorisation de police.

En 2012, l’Italie a lancé un appel d’offres en vue d’attribuer de nouvelles concessions. Le projet de convention de concession, joint à l’appel d’offres, prévoyait notamment que, lors de l’expiration, de la déchéance ou de la révocation de la concession, le concessionnaire était tenu de céder à titre gratuit l’usage des biens matériels et immatériels constituant le réseau de gestion et de collecte du jeu.

Lors d’un litige au sein de cet Etat, le Tribunale de Frosinone (Tribunal de Frosinone, Italie) s’interroge sur la compatibilité des nouvelles concessions avec le droit de l’Union, en particulier au regard de l’obligation imposée aux nouveaux concessionnaires de céder à titre gratuit, lors de l’expiration, de la déchéance ou de la révocation de la concession, les équipements utilisés pour la collecte de paris.

La Cour relève que l’obligation de cession n’apparaît pas discriminatoire, dans la mesure où elle s’applique indistinctement à l’ensemble des opérateurs ayant participé à l’appel d’offres lancé au cours de l’année 2012.

La Cour observe néanmoins qu’une telle obligation peut rendre moins attractif l’exercice de l’activité de collecte de paris. En effet, le risque pour une entreprise de devoir céder, sans contrepartie financière, l’usage de biens en sa possession est susceptible de l’empêcher de rentabiliser son investissement et constitue donc une restriction aux libertés d’établissement et de prestation des services, garanties par le droit de l’Union.

Toutefois, la Cour rappelle que l’objectif ayant trait à la lutte contre la criminalité liée aux jeux de hasard est de nature à justifier des restrictions aux libertés fondamentales, à condition que ces restrictions soient proportionnées, ce qu’il revient au juge national de vérifier.

Dans le cadre de l’objectif de lutte contre la criminalité liée aux jeux, la cession obligatoire des équipements utilisés pour la réception et la transmission des paris peut être justifiée par l’intérêt d’assurer la continuité de l’activité légale de collecte de paris afin d’endiguer le développement d’une activité illégale parallèle.

Lorsque la cessation de l’activité intervient du seul fait de l’expiration de la concession, le principe de proportionnalité n’est pas nécessairement respecté, dès lors que l’objectif de continuité de l’activité peut être atteint par des mesures moins contraignantes, comme, par exemple, la cession forcée des biens à titre onéreux au prix du marché.

Le juge national devra donc évaluer si le principe de proportionnalité est respecté en tenant compte, entre autres, de la valeur vénale des biens qui font l’objet de la cession forcée.

  1. Cour de Justice, Rosanna Laezza c. Italie, 28 janvier 2016, C-375/14
Publié dans Les libertés de circulation / Four Freedoms | Marqué avec | Laisser un commentaire

Sanction d’une entente par la Commission dans le secteur des alternateurs et des démarreurs

Le 27 janvier 2016, la Commission européenne a rendu une décision en matière de violation de l’article 101§1 TFUE, prononçant des amendes pour 137 789 000 euros à des fabricants de pièces automobiles dans le cadre d’une procédure de transaction1.

Toutes les sociétés, Melco, Hitachi et Denao ont reconnu leur participation et ont accepté de conclure une transaction.
La société Denao n’a pas été sanctionnée, bénéficiant d’une exonération totale au motif qu’elle a révélée l’entente à la Commission.

Les trois sociétés japonaises ont coordonné leurs prix et se sont réparti des clients ou des projets dans le secteur des alternateurs et des démarreurs, deux pièces importantes des moteurs automobiles.

Les contacts relatifs à la création et au fonctionnement de l’entente aient eu lieu en dehors de l’Espace économique européen (EEE), mais dans la continuité de la jurisprudence de la Cour, peut être sanctionnée une pratique anticoncurrentielle lorsque les acheteurs des produits sur le territoire de l’UE2, comme c’est le cas ici puisque l’entente a touché des clients européens, les alternateurs et les démarreurs concernés étaient aussi vendus directement aux constructeurs automobiles dans l’EEE.

L’enquête de la Commission a révélé qu’entre septembre 2004 et février 2010, les sociétés se sont réunies dans leurs bureaux respectifs et dans des restaurants et ont été régulièrement en contact par téléphone afin de limiter la concurrence entre elles. Les trois sociétés avaient notamment coutume:

- de coordonner leurs réponses lors de certains appels d’offres lancés par des constructeurs automobiles, en particulier pour fixer le prix auquel elles allaient soumissionner et pour déterminer qui décrocherait le marché en question;
– de se répartir certains constructeurs automobiles et certains projets afin de décider laquelle des trois fournirait des alternateurs et des démarreurs;
– d’échanger des informations sensibles sur le plan commercial, comme des éléments de prix et des stratégies de marché.

En vertu de la communication de 2006 sur la clémence, Denso a bénéficié d’une immunité totale pour avoir révélé l’existence de l’entente et a ainsi évité une amende de plus de 157 millions d’euros.

Grâce à leur coopération à l’enquête, Hitachi et Melco ont bénéficié de réductions d’amende au titre de la communication sur la clémence de 2006. Ces réductions tiennent compte du stade auquel ces entreprises ont apporté leur coopération et de la mesure dans laquelle les éléments de preuve fournis ont aidé la Commission à démontrer l’existence de l’entente.

Au titre de sa communication relative aux procédures de transaction de 2008, la Commission a réduit de 10 % les amendes infligées, les parties concernées ayant reconnu leur participation à l’entente et leur responsabilité à cet égard.

  1. Commission européenne, IP/16/173, 27 janvier 2016
  2. Tribunal de l’Union européenne, Intel, 12 Juin 2014, aff. T-286/09
Publié dans Droit de la concurrence / Competition Law | Laisser un commentaire

La Commission autorise l’acquisition de Rexam par Ball

Le 15 janvier, la Commission a donné son accord à l’acquisition de la société Rexam par l’entreprise Ball, deux acteurs du marché de la fabrication de cannettes pour boissons, accompagné de certaines réserves1 .

Rexam et Ball fournissent toutes deux des cannettes pour boissons et, dans une moindre mesure, des bouteilles en aluminium, aux producteurs de boissons non alcoolisées, de bières et de boissons énergisantes.
L’opération d’acquisition a été notifiée à la Commission le 15 juin 2015. Rexam et Ball étant respectivement les premier et deuxième fabricants de cannettes pour boissons dans l’Espace économique européen (EEE) et les leaders mondiaux sur ce marché, la Commission a ouvert une enquête approfondie sur la concurrence sur le marché des cannettes pour boisson le 20 juillet 2015.

L’enquête a montré que l’opération telle qu’envisagée au départ aurait réduit significativement la concurrence pour les clients ayant des installations de remplissage dans plusieurs pays de l’Union européenne.

En réponse aux craintes soulevées par la Commission, Ball s’est engagée à céder 12 usines, dix usines de corps de cannettes et deux usines de fonds de cannettes situées dans l’EEE.
L’activité à céder devrait avoir une capacité de production totale dans l’EEE de plus de 18 milliards de cannettes.

La Commission a conclu dans sa décision que les engagements garantissent le maintien d’un autre fournisseur important sur le marché. Ils permettent de remédier à l’ensemble des problèmes de concurrence constatés sur les marchés des cannettes pour boissons.
Ainsi, la Commission a donné son accord à cette opération d’acquisition.

  1. Commission Européenne, Communiqué de Presse du 15 janvier 2016, IP/16/80
Publié dans Droit de la concurrence / Competition Law | Laisser un commentaire

L’imposition différenciée des dividendes touchés par les sociétés mères d’un groupe fiscal intégré en fonction du lieu d’établissement des filiales est contraire au droit de l’Union

Par un arrêt Steria du 2 septembre 20151, la Cour de Justice a été saisie d’une question relative au système d’imposition français des dividendes de ses filiales touchées par la société mère.

Selon le droit français, les dividendes touchés par une société mère au titre des participations qu’elle détient dans d’autres sociétés peuvent être retranchés de son bénéfice net total et sont ainsi exonérés de l’impôt, sous réserve d’une quote-part de 5% correspondant aux frais et charges qui se rapportent aux participations. Toutefois, lorsque les dividendes proviennent de sociétés appartenant à un groupe fiscal intégré, la quote-part de frais et charges peut être déduite du bénéfice, si bien qu’au final, les dividendes ne sont soumis à aucun impôt2.

Seules les sociétés établies en France peuvent appartenir à un groupe fiscal intégré. Les filiales qui sont établies dans d’autres Etats membres ne peuvent donc pas bénéficier de la déduction fiscale de la quote-part. Les dividendes versés par ces filiales restent donc soumis à la quote-part de 5%.

La société Steria, détenant des participations dans des filiales établies dans d’autres Etats membres, estime que la règlementation française est contraire à la liberté d’établissement en ce qu’elle désavantage les filiales établies à l’étranger, qui ne peuvent pas bénéficier de la déduction de la quote-part alors que si ces filiales avaient été établies en France, elles auraient bénéficié de cette déduction.

Dans cet arrêt du 2 septembre 2015, la Cour considère que la réglementation française en cause désavantage les sociétés mères qui détiennent des filiales établies dans d’autres États membres, ce qui est de nature à rendre moins attrayant l’exercice par ces sociétés de leur liberté d’établissement, en les dissuadant de créer des filiales dans d’autres États membres.
Cette règlementation constitue donc une entrave à la liberté d’établissement.

Une différence de traitement pourrait néanmoins être justifiée lorsqu’elle concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou pour une raison impérieuse d’intérêt général.

Pour la Cour, la situation d’une filiale appartenant à un groupe fiscal intégré et celle d’une filiale n’appartenant pas à un tel groupe est objectivement comparable dans la mesure où, dans les deux cas, la société mère supporte des frais et charges liés à sa participation dans sa filiale.

La Cour a en outre examiné deux potentielles raisons impérieuses d’intérêt général : la nécessité de préserver la répartition du pouvoir d’imposition entre les Etats membres et la nécessité de sauvegarder la cohérence du système fiscal.
Elle écarte la nécessité de préserver la répartition du pouvoir d’imposition entre les Etats membres au motif que la différence de traitement ne porte que sur des dividendes entrants, perçus par des sociétés mères résidentes, de sorte que la souveraineté fiscale d’un seul et même État membre est concernée.
Elle écarte également la nécessité de sauvegarder la cohérence du système fiscal du fait que la réglementation française en cause ne procure aucun désavantage fiscal à la société mère du groupe fiscal intégré, qui compenserait l’avantage fiscal (exonération totale de l’impôt sur les dividendes) qui lui est octroyé.

La Cour juge que la différence de traitement introduite par la réglementation française n’est pas compatible avec la liberté d’établissement.
Cette disposition devra donc être modifiée, soit en étendant l’exonération de la quote-part aux filiales n’appartenant pas à un groupe fiscal intégré, soit en supprimant tout simplement l’exonération de la quote-part pour les dividendes versés par toutes les filiales.

  1. Cour de Justice, 2 septembre 2015, Groupe Steria SCA / Ministère des Finances et des Comptes publics, affaire C-386/14
  2. Régime prévu par les articles 145, 216 et 223 B du code général des impôts (CGI)
Publié dans Droit fiscal / Tax Law, Les libertés de circulation / Four Freedoms | Laisser un commentaire

L’exonération de TVA prévue par l’article 13 de la Sixième Directive du 17 mai 1977 ne bénéfice pas au transport d’organes conduit par un tiers indépendant

Par un arrêt en date du 2 juillet 20151 la Cour de Justice est venue préciser le champ d’application de l’exemption de TVA prévue par l’article 13, A, paragraphe 1, sous b) à d), de la Sixième Directive du 17 mai 19772.

Dans cette affaire, Mme De Fruytier exerce, à titre indépendant, une activité de transport d’organes et de prélèvements d’origine humaine en faveur de divers hôpitaux et laboratoires, sous l’autorité et la responsabilité d’un docteur en médecine.
L’administration fiscale belge a soumis à la TVA l’activité exercée par Mme De Fruytier.
Mme De Fruytier a formé des recours devant les juridictions nationales, jusqu’à la Cour d’appel de Lièges, après renvoi de la Cour de cassation belge, qui a posé la question préjudicielle suivante à la Cour de Justice de l’Union Européenne :
 » L’article 13, A, [paragraphe] l, [sous] b) et c), de la [sixième directive] s’oppose-t-il à ce qu’un transport de prélèvements et d’organes aux fins d’analyse médicale ou de soins médicaux ou thérapeutiques, effectué par un tiers indépendant dont les prestations sont comprises dans le remboursement opéré par la sécurité sociale en faveur de cliniques et de laboratoires, soit exonéré de TVA au titre de prestations étroitement liées à des prestations de nature médicale, c’est-à-dire ayant pour but de diagnostiquer, de soigner, et, dans la mesure du possible, de guérir des maladies ou des anomalies de santé ? »

L’article 13 de la Sixième Directive prévoit en effet une exonération de TVA pour les activités suivantes :
– « l’hospitalisation et les soins médicaux ainsi que les opérations qui leur sont étroitement liées, assurés par des organismes de droit public ou, dans des conditions sociales comparables à celles qui valent pour ces derniers, par des établissements hospitaliers, des centres de soins médicaux et de diagnostic et d’autres établissements de même nature dûment reconnus;
– les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l’exercice des professions médicales et paramédicales telles qu’elles sont définies par l’État membre concerné;
– les livraisons d’organes, de sang et de lait humains »

La Cour de Justice a jugé que l’article ci-dessus cité doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas à une activité de transport d’organes et de prélèvements d’origine humaine aux fins d’analyse médicale ou de soins médicaux ou thérapeutiques, exercée par un tiers indépendant, dont les prestations sont comprises dans le remboursement opéré par la sécurité sociale, en faveur de cliniques et de laboratoires.
En particulier, une telle activité de transport d’organes ne peut pas bénéficier d’une exonération de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des opérations étroitement liées à des prestations de nature médicale dès lors que ce tiers indépendant ne peut être qualifié d’«organisme de droit public» ni répondre à la qualification d’«établissement hospitalier», de «centre de soins médicaux», de «centre de diagnostic» ou de tout autre «établissement de même nature dûment reconnu», qui opère dans des conditions sociales comparables à celles qui valent pour les organismes de droit public.

  1. Cour de Justice, affaire C‑334/14, Belgique c/ Nathalie De Fruytier, 2 juillet 2015
  2. Sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme
Publié dans Droit fiscal / Tax Law | Laisser un commentaire

Un Etat Membre ne peut pas soumettre l’activité d’un organisme d’attestation à une obligation d’avoir son siège statutaire sur son territoire

Par un arrêt du 16 juin 20151 la Cour de Justice effectue un rappel clair de la liberté d’établissement comme principe ayant un champ d’application très large.

La société SOA Rina Organismo di Attestazione SpA est une société ayant pour objet social la fourniture de services de certification de qualité UNI CEI EN 45000.
L’Etat italien fait valoir que l’activité exercée par les sociétés organismes d’attestation participe à l’exercice de l’autorité publique, ce qui aurait pour effet de la soustraire du champ d’application tant de la Directive relative aux «services» dans le marché intérieur2 que des articles 49 et suivants du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne.

En effet, selon l’article 51 du TFUE, ne sont pas soumises à la liberté d’établissement les « activités participant dans cet État, même à titre occasionnel, à l’exercice de l’autorité publique ».
La Cour juge cependant en l’espèce que les sociétés organismes de formation sont des entreprises à but lucratif qui exercent leurs activités dans des conditions de concurrence et ne disposent d’aucun pouvoir décisionnel se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique. Dès lors, l’activité des sociétés organismes de formation est soumise à la liberté d’établissement.

Le fait d’exiger que le siège statutaire du prestataire se trouve sur le territoire national limite la liberté de celui-ci et l’oblige à avoir son établissement principal sur le territoire national.
Une telle obligation est selon la Cour prohibée par la Directive de 2006 et ne peut être justifiée d’aucune manière, y compris sur le fondement de l’article 51 TFUE. Permettre de se fonder sur l’article 51 TFUE pour se soustraire à la Directive de 2006 reviendrait en effet à priver celle-ci de tout effet utile.
Une Directive qui restreint l’application de l’article 51 TFUE est acceptée en tant qu’elle limite les possibilités pour les États Membres d’apporter des dérogations affectant sérieusement le bon fonctionnement du marché intérieur.

En conclusion, la Cour déclare que la Directive «services» de 2006 n’admet pas une réglementation nationale qui impose à ces organismes d’avoir leur siège statutaire sur le territoire national.

  1. Cour de Justice de l’Union Européenne, CP affaire C-593/13, Presidenza del Consiglio dei Ministri e a. / Rina Services SpA e a, 16 juin 2015
  2. Directive 2006/123/CE du Parlement et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux «services» dans le marché intérieur
Publié dans Les libertés de circulation / Four Freedoms | Laisser un commentaire

Le taux réduit de TVA à la livraison et à l’installation de matériaux économes en énergie n’est applicable qu’aux logements sociaux

Dans un arrêt en date du 4 juin 20151, la Cour de Justice a jugé que le taux réduit de TVA à la livraison et à l’installation de matériaux économes en énergie n’est applicable qu’aux opérations portant sur les logements sociaux et non à celles concernant tous les logements, comme le prévoyait la législation au Royaume-Uni.

En premier lieu, un taux réduit de TVA ne peut s’appliquer qu’aux livraisons et services figurant à l’annexe III de la directive TVA2.
Cette annexe mentionne la «livraison, construction, rénovation et transformation de logements fournis dans le cadre de la politique sociale» ainsi que la «rénovation et la réparation de logements privés». L’installation de matériaux économies en énergie ne rentre dans aucune des deux catégories.

En second lieu, la directive TVA s’oppose à des mesures nationales qui reviendraient à appliquer le taux réduit de TVA à la livraison, la construction, la rénovation et la transformation de tout logement, indépendamment du contexte social dans lequel de telles opérations s’inscrivent.
Le Royaume-Uni défendait une politique d’amélioration des logements susceptible de produire des effets sociaux et donc justifiant une politique de taux réduit de TVA.
La Cour écarte l’argument sur le fondement qu’en prévoyant l’application d’un taux réduit de TVA à la livraison et à l’installation de matériaux économes en énergie quels que soient les logements concernés et sans distinction des catégories de personnes qui les occupent, les mesures britanniques ne peuvent pas être regardées comme ayant été adoptées pour des raisons d’intérêt exclusivement social ni même pour des raisons d’intérêt principalement social.

  1. Cour de Justice, Commission c. Royaume-Uni, 4 juin 2015, C-161/14
  2. Directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L347, p.1), telle que modifiée par la directive 2009/47/CE du Conseil, du 5 mai 2009 (JO L116, p.18)
Publié dans Droit fiscal / Tax Law | Laisser un commentaire

Case Focus : Berlington Hungary Tanácsadó és Szolgáltató Kft. a nd Others v Magyar Állam (11 June 2015)

Focus on the Berlington’s case (Court of Justice) of the 11th June 20151.

Up until 9 October 2012, slot machines could be operated in Hungary either in casinos or in amusement arcades. Tax on these machines were raised several times between 2011 and 2012. Since the 12th October 2012, slot machines cannot be operated in amusement arcades at all anymore.
The slot machines operators brought an action before national courts. The Fővárosi Törvényszék (Budapest Municipal Court, Hungary) asked the Court of Justice whether those measures are compatible with EU law.

The Court found that national legislation which authorises the operation and playing of certain games of chance only in casinos constitutes a restriction on the freedom to provide services.
Likewise, a measure that drastically increases the amount of taxes levied on the operation of slot machines in amusement arcades can also be considered restrictive if it is liable to prohibit, impede or render less attractive the exercise of the freedom to provide the services of operating slot machines in amusement arcades.
In that regard, the Court observed that that would be the case if the national court found that the tax increase prevented profitable operation of slot machines in amusement arcades, thereby effectively restricting it to casinos.

The Court also pointed out that the objectives pursued by the contested measures, namely the protection of consumers against gambling addiction and the prevention of crime and fraud linked to gambling, are, in principle, capable of justifying restrictions on gambling.
The national court must control whether the measures are capable of remedying, in Hungary, a real problem linked to criminal and fraudulent activities concerning gambling and addiction to gambling. The national court must also control whether it is not on such a scale as to make it impossible to reconcile with the objective of curbing addiction to gambling, which it is for the national court to determine.

The Court judged finally that when the national legislature revokes licences that allow their holders to exercise an economic activity, it must provide a reasonable compensation system or a transitional period of sufficient length to enable that holder to adapt.

  1. Court of Justice of the European Union, Case C‑98/14, Berlington Hungary Tanácsadó és Szolgáltató Kft. and Others v Magyar Állam, 11 June 2015
Publié dans Les libertés de circulation / Four Freedoms | Laisser un commentaire

Case Focus : Kernkraftwerke Lippe-Ems GmbH v Hauptzollamt Osnabrück (4 June 2015)

Focus on the Kernkraftwerke Lippe Ems’s case (Court of Justice) of the 4th June 20151.

In 2010, Germany adopted a law on excise duty on nuclear fuel (Kernbrennstoffsteuegesetz). That law introduced, for the period from 1 January 2011 to 31 December 2016, a duty on the use of nuclear fuel for the commercial production of electricity.
The duty in respect of 1 gramme of plutonium 239, plutonium 241, uranium 233 or uranium 235 is 145€ and it is payable by nuclear power station operators. It is designed to raise revenue with a view, inter alia, to contributing, in the context of fiscal consolidation
and in accordance with the polluter-pays principle, to a reduction in the burden entailed for the Federal budget.

Kernkraftwerke Lippe-Ems which operates a nuclear plant has challenged the duty before German courts.
The Finanzgericht decided to submit the question of the compatbility of the duty with EU law to the Court of Justice.

The Court of Justice replied that EU law does not preclude a duty such as the German duty on nuclear fuel :

– First, the Court rejected the argument that nuclear fuel must be exempt from taxation under the directive on taxation of energy products and electricity. That fuel does not appear on the exhaustive list of energy products set out in the directive, nuclear fuel cannot be covered by the exemption provided for some of those products.

– Next, the Court found that the directive concerning the general arrangements for excise duty does not preclude the German duty on nuclear fuel, which is levied on the use of such fuel for the commercial production of electricity.

– Moreover, the Court ruled that the German duty on nuclear fuel does not constitute State aid prohibited by EU law. It is not a selective measure. Methods of producing electricity, other than that based on nuclear fuel, are not affected by the rules introduced by the law on duty on nuclear fuel.

– Finally, the Court considered that the Treaty establishing the European Atomic Energy Community (‘Euratom Treaty or EAEC’), which covers nuclear fuel, does not preclude the duty in question, either. That duty does not constitute a charge having equivalent effect to a customs duty. It is levied not because nuclear fuel has crossed a frontier but because it is used for the commercial production of electricity, irrespective of the source of that fuel.

  1. Court of Justice of the European Union, Case C‑62/15, Kernkraftwerke Lippe-Ems GmbH v Hauptzollamt Osnabrück, 4 June 2015
Publié dans Droit fiscal / Tax Law | Laisser un commentaire